Une enquête inédite, un récit sensible : 30 ans d’une histoire méconnue, celle du retour du loup en France.
Lorsque son père découvre un loup dans une forêt du Mercantour, l’animal appartient encore aux légendes. Rencontre marquante pour cette enfant qui grandit en pleine montagne au cœur du parc national et côtoie les bergers de l’Alpe… Tout poussait la journaliste Caroline Audibert à remonter la piste du loup parmi les derniers territoires sauvages de l’hexagone. Minutieusement, elle démêle trente ans d’une histoire commune qui rapproche les hommes de cet animal qui se joue des frontières. Le loup n’est plus le héros d’un conte pour enfants. Il fait la Une des journaux, désespère les bergers, intéresse la génétique, enthousiasme les écologistes, préoccupe les ministères, motive même un procès… Son retour inopiné fascine ou irrite, révélant d’indépassables contradictions au sein d’une grande fresque humaine où chacun défend avec passion sa propre vision de la nature.
Dans le contexte d’une érosion majeure de la biodiversité, cette enquête littéraire initie à une plus vaste idée de l’écologie, à une vision systémique des choses. Elle explore en profondeur la question du vivre-ensemble entre les hommes et le sauvage dont le loup se révèle le symbole. Serions-nous à l’aube d’un nouveau cycle ?
Des loups et des hommes est paru le 4 octobre 2018 dans la collection Terre humaine aux éditions Plon, sous la direction de l’Académicien Jean-Christophe Rufin. L’ouvrage est récompensé par le prix littéraire de l’essai 30 millions d’amis 2019, dit « le Goncourt des animaux » sous la présidence du romancier Joël Dicker.
Extrait : Le loup de Fontan, vallée de la Roya (Mercantour), 1987
« «Elles tombent comme des mouches…» déplora le berger en arrivant au village. Il avait la mine des mauvais jours. Les forêts se peuplaient de ténèbres et de chimères effrayantes. Inquiets, les gens ne parlaient que de cette bête qui hantait la montagne. Ils fouillaient au plus profond de leur mémoire. Les vieillards racontaient des histoires de pièges, de poisons et de loup-garou. On disait que bientôt elle s’en prendrait aux enfants et, pourquoi pas, aux bergers. Un jour d’hécatombe, tous les éleveurs du pays se retrouvèrent au bar. Gabrielle ne chômait pas. Après s’être échauffés à coups de rouge du pays, ils décidèrent d’aller voir le maire. Deux cents cadavres sur les bras, ça commençait à peser… Les assurances ne voulaient pas se mouiller. Il fallait lui régler son compte, à la bête. Plus tôt on lui logerait une balle entre les deux yeux, mieux ce serait pour tout le monde. Les maires des communes voisines se réunirent pour rédiger un arrêté municipal. L’été avançait, les troupeaux montaient en crête. Tout le monde se baladait fusil à l’épaule : bergers, chasseurs et même gardes du parc ne sortaient plus sans leur carabine. Ils avaient reçu ordre du ministère de l’Environnement d’abattre la bête malfaisante. Dans la vallée, on parlait d’un fauve évadé d’un zoo ou d’un loup, certains avaient aperçu un lynx, d’autres étaient sûrs d’avoir surpris un puma bondir devant leur voiture, d’autres encore prétendaient qu’elle était aussi noire qu’une panthère. En tout cas, une chose était sûre, la bête touchait à peine à ses proies, se contentant le plus souvent d’en boire le sang. L’automne fit grossir le mystère. Les bergers étaient à cran. Leurs troupeaux fondaient à vue d’œil. On fit fabriquer une cage pour piéger la créature. On la voulait vivante. On organisa même une grande battue autour du massif de l’Authion. Dans un brouillard épais, les hommes avaient encerclé la montagne. Ça criait de toutes parts, de peur de prendre une balle perdue. La bête ne se montra pas. La morsure de l’hiver figeait la vallée. Plus de trois cents brebis avaient péri, certaines vidées de leur sang, et les chasseurs rentraient bredouilles. »
Une enquête inédite, un récit sensible : 30 ans d’une histoire méconnue, celle du retour du loup en France.
Un livre choral qui explore la complexité d’une situation symptomatique de notre époque.
Client: | Terre humaine, éditions PLON |